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Met Barran
22 septembre 2008

Do you you know Juan Morata ?

C'est en ces termes que je me suis entendu aborder l'autre jour dans la rue. C'était un jeune anglais qui prolongeait son séjour perpignanais après Visa pour l'Image pour un complément d'enquête... Je me suis arrêté, et il m'a redit toujours en anglais, comme si cela allait de soi, sa question... On lui avait signalé que ce Monsieur Morata était l'auteur d'un morceau musical qui s'appelait "Moreneta's prayer" (prière à la vierge noire) et il cherchait à se documenter pour l'inclure dans un livre sur "Les gens oubliés qui mériteraient sans doute de le rester mais que quelque chose de l'ordre de la micromémoire nous pousse à retrouver pour les auréoler enfin".   Il n'était pas forcément tombé sur la bonne personne, car Bitterois d'origine je n'étais-moi qu'en affaire ce jour-là sur Perpignan. Je me suis contenté de le diriger ver une librairie, devant laquelle je m'étais arrêté, il ya avait quelques minutes à peine. Elle était proche de notre lieu de rencontre et on saurait peut-être lui apporter quelques renseignements. Rentré sur Béziers, je me suis souvenu qu'il existait non loin de chez moi un vieux collectionneur de disques, Marcel L., originaire de Perpignan. "Chanteur, musicien, compositeur, chef d'orchestre, il était un peu tout ça -me dit Marcel L. Juan Morata c'était en fait était un pseudonyme, son nom d'état civil était André Fabresse. Je crois qu'il était né à Prades, ou dans un village du Conflent. A Perpignan, il habitait nom loin du grand marché, qui aujourd'hui est occupé m'a dit mon fils par l'Espace Méditerranée. Gérard, mon fils, adore l'Usap... Juan Morata (je ne sais pas s'il c'était appelé ainsi pour faire espagnol ou catalan, il y avait bien ce Pablo Casals) eut, comme l'on dit, son heure de gloire. Une gloire avant tout locale, de Canet plage à Vern et-les-Bains ou Font-Romeu qui, dans les années 1960, étaient les figures de proue du tourisme départemental. La gloire, cher Michel Pagell, il l'avait gagné par sa musique aux accents de baloche et surtout, continua Marcel L. dont la mémoire paraissait retrouver des couleurs au fur et à mesure qu'il y tirait sur le fil de sa pelote aux souvenirs...et surtout des mélodies populaires qui chantaient son pays, sa mer, son soleil, son Canigou. Votre anglais, devait penser à la prière que Juan Morata écrivit pour la vierge noire de Font-Romeu, ce ne ne peut être qu'elle. Je me souviens et nous habitions, ma femme et moi encore au quartier Saint-Gaudérique où nous tenions un petit commerce de grains, un ténor de l'opéra de Lyon, Etienne Arnaud, qui avait des attaches en Salanque, et le grand organiste Pierre Vidal firent le déplacement pour la création. Un disque fut même enregistré, un 45 trs de l'époque. Ma femme l'avait acheté...mais dans un déménagement nous l'avons égaré. Juan Morata, c'était du pittoresque, du folkclore, des musiquettes gentillettes.... Vous n'en avez jamais écoutée? Peut-être aimeriez-vous çà... me lança-t-il avec une pincée d'ironie. Mais, comme dirait mon fils, sa légereté n'a pas empêché un Pascal Comelade non seulement de s'intéresser à lui mais de lui rendre hommage dans un disque dédié à Vernet- les- Bains. En fait, ce qui le rendit célèbre ce sont les sardanes qu'il composa et qui, pendant un assez longtemps, constituèrent la carte de visite musicale de nos principales stations de vacances. De grandes cobles -dans ma jeunesse à Sant Galdric on disait encore "couples"-de la Barcelona a la Perpinyà jouaient Morata. Ce que je peux aussi vous dire, c'est que vers le milieu des années cinquante du dernier siècle, un brin de notoriété lui fut concédé à Paris. Ah! vous le savez sans Paris rien n'est rien. C'est à la belle époque de l'opérette et de Mogador quand Henri Varna -Varna, ne vous dit sans doute rien? c'est vrai vous êtres trop jeune. Quand Varna monta Les Amours de Don Juan d'après Lord Byron et décida...allez donc savoir comment Varna en avait eu le coup de foudre... d'y inclure des airs sudistes de Juan Morata. Vous voyez d'ici, la rose de vanité qui s'épanouit tout d'un coup sur le veston du Morata, du seul fait de cette association avec le Lord. Tous les Roussillonnais en étaient orgueilleux; chez nous c'était le cas: le frétillement des fibres du pays assurément. Je devrais dire seulement "de nombreux", car Morata avait aussi, en tant que musicien, de nombreux détracteurs qui le qualifiaient de superficiel, d'opportuniste, ou de "commercial", ce gros mot qui, toujours, est lâché par la bouche des jaloux. Quand nous avons quitté Saint-Gaudérique pour Béziers notre roman avec la terre roussillonnaise s'est considérablement effiloché. Ce qui est certain c'est que lorsqu'il fut demandé à Juan Morata sa "pregari a la moreneta", il était devenu l'un des musiciens incontournables, l'un des officiels des fêtes et des hommages. Il répondait "présent!" à toute sollicitation. Mais sa popularité n'était pas volée, elle trouvait racine et nourriture dans le vrai peuple, et il collaborait aussi bien avec le groupe artistique de Pia magnifiquement conduit par Louis Torreilles qu'avec Jeanne Mauréso-Mouragues, poétesse au coeur si candide et à l'imagination noëlique. Je pense, Michel Pagell, vous avoir tout dit sur cette personne. Je regrette d'avoir égaré le 45 trs dont je vous ai parlé, je vous l'aurais offert avec plaisir." Il ne me restait plus qu'à remercier Marcel L. et je rentrais chez moi en regrettant de ne pas avoir demandé au jeune anglais croisé à Perpignan une adresse à laquelle j'aurais pu lui faire parvenir de si précieux renseignements. Et d'autres, puisque cliquant sur mon ordinateur internet lève le rideau et me signale Juan Morata (1899-1977).

Michel Pagell

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