Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Met Barran
15 avril 2009

TGV, paysage et carte postale.

Ah, quel traceur ce TGV. Lui il remue vraiment de la terre et déplace les lignes du paysage. Ce n'est pas ce qu'il ferait de mieux selon un de mes amis tout aussi observateur que moi, beaucoup plus si je tiens compte de son point d'observation. Un phare travelling. Lui, des délais et des effets économiques et sociaux, et très accessoirement culturels, il s'en moque un peu qu'ils soient ou non respectés qu'ils soient plus ou moins importants que les calculs de uns et des autres. Lui, il ne voit que des paysages bouleversés, des niveaux de terrain rehaussés, des vallons chevauchés par des ponts, des collines étêtées et aplanies, des flancs de montagne tailladés et même des massifs traversés de part en part. Tout cela vif comme une blessure ici, recouvert d'un cataplasme béton là, en attente de gazes naturelles un peu partout. Le spectacle chenille dans la nature. Reliant certes deux points, mais en "distanciant" quelques autres. Obstruant des vues, en fendant d'autres...L'ami me dit que haut-perché il voit mieux que moi la mise en pièces de nos paysages. Que ce n'est plus comme de notre temps [mais au nom de quoi parle-t-il pour moi?), que tout chavire, se rétrécit, et s'enlaidit. Oui, le TGV fait bouger les lignes, mais mal, très mal en retournant la terre, en sacrifiant cette terre, riche de vignes, de champs, de bois, de prairies...Mais je n'écoute plus son ode pétaino-virgilienne. Et lui rappelle que l'affaire des "bouleversements" n'est pas nouvelle, que la géographie est écrite ("raturée" appuie-t-il brutalement) par l'homme qui se regroupe et l'homme qui se déplace, que l'espace inamovible est un leurre pour contemplatifs, que...bien avant ce foutu TGV qui n'aurait même pas un chapeau de vapeur pour s'annoncer en gare...oui, bien avant, lui  les Via Domitia et la Via Tarragonensis [si l'on ne dit pas ainsi c'est pareil] avaient relooké nos régions maritimes, et de villages en routes, de villes en diligences, trains et automobiles, et  de  nos chaumières autarciques de nos enfances passant aux unions communautaires de nos âges bien plus avancés, au rail et à la route de plus en plus excités, pressés, puis ralentis se sont ajoutés (non pas substitués, mais ajoutés), des autoroutes et cette récente  architecture (mais pour l'heure encore inachevée) de ponts, d'aqueducs, de barres et de tunnels. C'est la poursuite des bouleversements...et non cette "décomposition paysagère", dont parle avec véhémence mon ami. J'y vois quant à moi  -et lui disant ce que je vois je m'éloigne d'anciennes valeurs partagées- une "refondation", une "recomposition" de paysages et non la "fin" du paysage. Il lui aurait suffi, à cet ex-ami, d'avoir une certaine "culture de la carte postale "pour se rendre compte sans discussions colériques que chaque génération -ou deux, ou trois...c'est suivant les millénaires- s'identifie à une "carte postale". La nôtre a vieilli, elle est écornée; déchirée, un peu salie même (on ne prend jamais assez soin des bonnes images qui infusent dans nos mémoires), le Canigou y est moins enneigé,  l' Empurdan et le Roussillon se perdent dans de nouveaux entrelacs et ses habitants deviennent des toupies .C'est vrai, mais il est déjà une nouvelle "carte postale" qui se construit, entre béton et métal, or il n'est pas une seule construction  nouvelle qui ne coûte, ne dérange, n'énerve. Ainsi toute progression spatiale dans  la "mise en en place et en relief" du TGV devrait-elle s'accompagner d'écriteaux hauts-perchés sur des pylônes -et bien volontiers je récuse ici ceux  menaçants de la THT, J.-M., avec cette banale et humaniste mention: "Veuillez nous excuser pour les désagréments actuellement causés". Je sais mon ex-ami ne pouvait  pas être d'accord avec cette concession au...au...au..., ne disait-on pas, naguère, au progrès, au développement. Mais je m'arrête, je vois déjà arriver peintres, photographes et vidéastes. Nos petits l'auront leur "carte postale".   

Publicité
Publicité
Commentaires
Met Barran
Publicité
Archives
Publicité