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Met Barran
22 septembre 2012

Cafard

Je suis en vigilance dans mon jardin. On m'a prévenu qu'un ennemi rôde. Sortant d'un anfractuosité murale mais à même le sol, un cafard, un joli petit cafard me tire par le nez. Vient-il de visiter quelque taupe ou grillon? Ou veut-il m'entraîner? Il est très sûr de lui. J'ai l'impression qu'à ma vue, il s'arrête et me nargue. Mais pourquoi m'abaisserais-je à le vérifier, je ne suis pas entomologiste psychologue. Je garde donc ma faction. Il repart. Il a tout compris de moi. Ma cuirasse est si mince qu'elle laisse transparaître tous les battements de mon coeur. Ah! Ce coeur...lâchera-t-il ou se fortifiera-t-il face à l'ennemi qui rôde. Peut-être l'ennemi est-il déjà là. Mais qui est-il? Ce cafard que je vois longer le mur sans s'y frotter, mais qui se presse, augmente sa vitesse. Comme s'il ne faisait pas trop bon lanterner, qu'il fallait vite se mettre à l'abri. Il ne faut pas croire à l'imprudence des cafards. La plupart du temps ils sont victimes de guet-apens. J'ai l'impression qu'il me regarde soupçonneux et s'épouvante vraiment quand il aperçoit que je me saisis d'un balai adossé au mur. Un beau balai au long manche de bois et à longs poils souples mais ferrés qui, généralement, me sert à chasser les roucoulades de chats et à ratisser les feuilles après leur chute. C'est ainsi à chaque saison que l'automne soit venteux ou pas, frappe à ma porte, mais je n'aime pas ratisser dans les tourbillons du vent. Le manche bien en mains, j'observe le cafard dans sa fuite. Certes il ne s'en laisse pas compter, mais il ne se laisse pas intimider non plus. Comme s'il était habitué à ce type de situation. J'ai beau lever mon balai, les poils frétillant d'aise prochaine, il poursuit sa fuite. Toujours le long du mur, en espérant (on peut le déduire facilement) son salut à un prochain virage. Ce ne sera pas le cas. Zut! Il se cogne, le malheureux, à un autre mur, qui fait angle avec le premier, et le voici grogui, boxeur sonné à terre, dans le coin. Il déchante. Je le regarde avec un demi-sourire de victoire, je suis prêt à déposer à terre mon arme en signe d'armistice, en prélude de paix. Mais la bestiole, j'aurais du m'en douter, n'est pas cafard qui veut, a de la ressource. Revenue à elle, plutôt que de prendre la poudre d'escampette et la clef des champs, comme le font ce qui ne seront jamais ni champions ni héros,  elle me tient tête. Ah! le satané cafard! toujours le long du mur. Le voici, à nouveau valide, rebroussant chemin (a-t-il en tête une issue que je ne pourrais deviner?). Je regarde autour de moi. Rien! J'arme mon regard d'une sévérité de laser et la dirige vers lui. J'ai bien l'impression qu'il en a froid dans le dos, il ralentit sa course mais il ne cède pas. Pourquoi céderait-il devant le fantoche de jardinier qui est  moi.  A peine feint-il le mouvement d'escalader (syndrome du gecco) le mur, mais il se ravise (la peur du vertige, le chemin vertical n'est pas un bon choix), et il file, file, file jusqu'à l'extrémité du mur. Une arête l'arrête; assommé, une nouvelle fois. Se relèvera-t-il? J'ai l'impression  (je crois que c'est la dernière) qu'il en est capable. Il a -comme toutes les bestioles de son espèce- plus d'un tour dans son sac et de l'énergie à revendre. Comme menacé, par la force de résistance que je lui prête, je soulève mon balai comme une hache ou un marteau et je l'abats sur lui, l'estoquant comme l'on dit dans les mauvais roman de chevalerie taurine. Le corps déchiqueté au milieu de son jus. Y ai-je pris plaisir? J'étais en vigilance dans mon jardin, alors? N'était-ce pas l'ennemi qui était déjà dans la place? N'avait-il pas pénétré déguisé en jeune cafard? Et la légitime défense?  Non! Je n'y ai pris nul plaisir. J'ai fait simplement mon boulot: "décafardiser" mon jardin. "Assassin tout de même" crie un groupe de manifestants passant dans rue. Je ne vois pas leur banderole mais je la devine.

xxx

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