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Met Barran
2 mai 2015

"Danser sur place"

Il ne te suffit pas que je sois un auditeur assidu. Tu voudrais, en plus, que je pousse ma propre chansonnette. Ce que tu peux être épuisant en sarcasmes ! Non, je ne serais pas ton successeur.

Du fond de la basse-cour, un poussin me crie que c'est terrible depuis qu'il s'est tiré de sa coquille. Je l'entends sans comprendre.

Cette Pontiac en exhibition si tu ne peux pas te la payer pour vos noces d'or, photographie-là ! Dans votre chambre, au-dessus de votre tête de lit, ça aura de la gueule, tout autant que le lion muet de la Metro Goldwyn Mayer.

On me dit, et comme je note sur un carnet tout ce que l'on me dit, j'en ai des piles et des piles de carnets de remarques, on m'a dit qu'il ne servait à rien de balancer comme çà des phrases en l'air, phrases jusqu'au bout, ou moignons, ou tronçons de phrases. Que puis-je répondre à ça (d'ailleurs je ne réponds plus, ai-je même répondu une seule fois?) si l'on ne comprend pas que je balance une phrase quand j'ai un poil sur la langue, un poil qui me gêne, me presse et me tarabuste et que je suis bien obligé, pour restaurer ma petite tranquillité de hâbleur,  d'arracher, que la conséquence en soit blanc navet ou rouge betterave.

"Pourquoi montes -tu sur cette estrade", lui ai-je demandé, et avec un sens de l'à-propos que je ne lui savais pas encore, il m'a répliqué "mais, p'tit père, pour la battre, voyons la battre, car je veux devenir avant cinquante ans batteur d'estrade". Je ne jugeais pas nécessaire de pouffer de rire.

Dans ce monde à l'emporte-pièce, qui est préposé au guet ? Qui a la bonne clef du pas de panique, les enfants

Je ne sais la part exacte prise par le traducteur dans l'envoûtement que j'ai ressenti dès les premières pages du roman Les mouettes de Sándor Máraï. Je n'ai aucun terme de comparaison, ignorant tout de la langue hongroise, pour l'apprécier, mais je sens bien que cet envoûtement n'est pas feint, joué, ajouté, qu'il y a une belle connivence, que l'auteur est bien là, dans sa chair d'homme, avec sa dextérité narrative et sa poésie de l'enigme, du mystère, de la prémonition. On ne dit pas toujours le bien qu'il faudrait de certaines traductions. Celle-ci, signée Catherine Fay, mérite, monsieur le conseiller, une corbeille de paisibles roses européennes. Plaisir continu ! (Lu, en livre de poche).

Avec tous les GPS et les décodeurs mis à notre disposition par les magiciens du matin, de l'après-midi et de la nuit, pourquoi nous voyons-nous nous astreints à "danser sur place?"

Il y a quatre ou cinq décennies, il était de bon ton, dans de jeunes milieux de l'art éméchés par les eaux de vie des avant-gardes, de dire à hauts cris et longueurs de colonnes pic et pendre du peintre Henri Bonnard. Depuis les ivresses étant tombées et d'aucuns ayant même noué autour de leur taille le tablier de la respectabilité des crus en catalogue et salles des ventes, Bonnard s'est refait une santé et a repris toutes ses couleurs et gagné même en adorateurs.

Qui ne dit mot consent. Qui ne fait rien doit se taire. Ou se cacher.

Heureusement qu'il a des généraux pour calmer l'ardeur guerrière des civils me rétorqua, un soir que nous dînions entre amis, un général bien étoilé qui formait part des convives. J'en ai pris de la graine. Plus tard, Serge l'ami chez lequel nous avions dîné m'apprit, et il ne plaisanta pas, que Robert était "un général, c'est rare, anarchiste".

Si tu ne peux apprendre tous les éléments de langage de ta tribu, copies-en au moins l'accent. Aigu à gauche, grave à droite, circonflexe au centre. Les extrêmes n'ont pas de signe particulier, ils sont extrêmes, de même sonorité, point final.

xxx

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