Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Met Barran
14 juillet 2015

14 juillet, jour de pèche

Sommes nous sortis du cauchemar grec? N'étant ni Grec ni expert européen Bac + 100, je me plais à lire Constantin Cavafy (1863-1933) et Yannis Ritsos (1909-1990). Deux beaux et anciens cadeaux d'amis qui devaient bien pressentir que tout n'irait pas comme sur des roulettes sur l'Acropole.

Tous les 14 juillet ne se valent pas. Il y a ceux qu'on n'a pas connus, ceux que l'on ne devait pas connaître, ceux que l'on a oubliés. Avez-vous le plus petit souvenir du meilleur de vos 14 juillet, avec ou sans lampions?

Le principe du défilé - à ne pas confondre avec la manif syndicale, politique...-c'est de marcher en ordre et au pas musical devant des gens qui, derrière les barrières, restent debout, tassés en ordre et qui, allez donc savoir pourquoi, applaudissent la plupart du temps. Qu'il vente ou pleuve. S'il grêle, à grains et à pruneaux, le défilé s'arrête. Les gens des barrières se dispersent. Il n'y a plus rien à voir.

Ne poussez pas le raisonnement trop loin si vous ne voulez pas qu'il se détache de vous et vous traite d'esclavagiste.

Il faut s'oublier pour se retrouver, dit-on parfois. J'ai essayé mais je ne me suis pas retrouvé. C'était, naturellement, un jour de guigne.

Il est déconseillé de battre des oeufs avec ses mains. Cela dit, faites- comme vous le sentez, il y a des dizaines de recettes pour réussir une bonne omelette. Les apprentis admiraient ce maître de stage surnommé "Brise Coquille". Il n'avait pas son pareille pour séparer le jaune du blanc de l'oeuf. Vous riez...et pourtant!

Triompher de son travail, peut-être est-ce bien possible, mais à la condition qu'il ne nous ait pas déjà écrasé.

Comme il aurait aimé vagabonder dans la légèreté mais ses semelles de plomb le lui interdisaient.

En pays cloporte, explosa-t-il, les orgueils sont toujours démesurés, adipeux, visqueux, j'arrête ici ma période pour que l'on ne copie pas mes élans et mont talent de véhémence.

Je l'ai regardé de face et, seulement, à ce moment là, j'ai compris son travers, il ne pouvait me voir tout plongé qu' il était dans ses ménages intérieurs, dans son ego-domesticité.

J'ouvre les yeux. c'est un petit matin. Je me réveille. Un drone importun qui a réussi à se glisser par une fenêtre entr'ouverte passe et repasse devant moi, narguant mon nez et mes oreilles. Je m'étonne un peu d'être, sitôt, une cible. Je m'étais la veille endormi la conscience blanche, tranquille et sereine. Je tends mon bras, comme je le fais d'habitude, pour m'aider à sortir du lit. Le drone tourne de plus belle autour de lui. Soupçonnerait-on en haut-lieu que je cache des secrets dans la paume de ma main. C'est là, m'interrogeant sur qui serait le commanditaire de la surveillance rapprochée, que je m'aperçois que j'ai mal vu, que ce drone n'est pas un drone, mais une mouche, une mouche lève-tôt, mais une mouche. Mais elle non plus ne se lasse pas de me faire -ce que dans son petit esprit de volatile menu menu doit penser être- des amabilités. Mais, je ne serai le dupe de personne, drone ou mouche, ayant éliminé l'illusion du drone, je m'attaque à la réalité de la mouche, qui devient de plus en plus agaçante avec son sifflement persifleur. Je retends mon bras, et ma main l'attrape. Mon menton autant que mon nez est rassuré. La prisonnière me taquine le creux de la main qui l'enferme, oh! pas longtemps. D'un tiroir de ma table de chevet, je tire une petite boîte d'allumettes, je l'ouvre délicatement et y enferme avec la virtuosité que l'on me connaît, ma prise. Elle proteste et gigote bien un peu, mais j'entends rapidement qu'elle s'est rendue à la raison, sans doute a-t-elle causé avec d'autres prisonnières. Pour être petite et exiguë, ma boîte d'allumettes peut en détenir un nombre pouvant autoriser plusieurs jours de pêche. Tout à l'heure quand je serai devenu un homme comme il faut, propre, rasé, habillé, peigné, je mettrais le chapeau de paille qui me va si bien, selon Mme Friture, je prendrais une de mes cannes à pêche, la plus archaïque de ma collection de sept, j'aime l'archaïque pour son archaïcité, ne riez pas ce n'est pas une vanne, mais un principe presque métaphysique. Ainsi équipé, et bien chaussé d'une paire de bottes encore un peu crottées de ma dernière sortie, je quitte la maison et empruntant le petit chemin des Mûriers (ça fait rêver, hein!), et passant devant un tas de ruine que les malins du coin appellent "notre oppidum", j'arrive près de la rivière, oh! une rivière généralement souffreteuse, qui offre peu d'eau, mais qui ce matin, sans doute la nuit a-t-elle été (et je l'ai ignoré dans mon sommeil du juste ignoré, montrait une belle générosité. J'ai ouvert et consolidé mon siège dépliant sous un arbre. Un charme, si j'en crois ce que dit mon précis de botanique, resté sur la table de chevet de ma chambre. Et j'ai installé mon appareil de Nemrod  aquatique, prenant bien la précaution de choisir la plus belle -et donc la dernière-de mes prisonnières pour la proposer en appât d'avant-garde aux insouciantes créatures qui errent et chapardent d'un rivage à l'autre pour la survie d'un destin ichtyologique. Je fixe ma mouche, familièrement -on s'attache vite, vous savez-je l'appelle mouchette. J'ai demandé à l'hameçon (qui m'a obéi, ce qui n'est pas toujours le cas) de ne pas se montrer trop cruel. Je regarde ma canne, mon fil, son petit bout. Une belle ligne! Un petit vent secoue les feuilles du charme, beau et heureux -lui aussi. L'eau me semble courir à mes pieds, elle miroite comme si elle cherchait à me défier, j'aperçois un banc de poisson (j'exagère, je n'en ai compté que trois, mais clinquants, l'oeil vif). Je retiens ma respiration, je serre mon poignet et je lance mon affaire pour le meilleur et pour le pire. Le meilleur ce serait, une bonne friture. Le pire, je n'ose l'imaginer. C'est parti. Et voilà un nouveau drone qui vient au renseignement. Non.. pas un... mais... cinq ou six, et ces petites bêtes -je les ai reconnues- de s'obstiner, de vrombir comme des hélicoptères qui s'envolent. Que pouvais-je faire d'autre sinon m'enfuir, ou leur donner la chasse? Je me suis fait guerrier.  Mal m'en a pris. Lors d'une contre-attaque, j'ai perdu l'équilibre et le plateau des vaches et je me suis retrouvé, tête, cul et pieds dans l'eau... la bouche auprès de ma mouchette  qui après avoir craint que je ne la croque n'arrivait pas à croire à cette extraordinaire revanche. Mouchette et moi au fond de l'eau... Et des triades et des triades de poissons, qui couraient dans tous les sens pour nous voir et  se moquer de nous à pleines branchies.

T. IENS-DONC

xxx 

Publicité
Publicité
Commentaires
Met Barran
Publicité
Archives
Publicité