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Met Barran
19 juillet 2015

Triomphale Violeta Duarte

Violeta Duarte, elle colle tellement à la scène artistique nordcatalane que l'on ne l'en distinguerait plus. Et pourtant, sa singularité y est majeure. Affirmée au fil des décennies. Née en Argentine, avec le castillan sur les lèvres et la tête remplie de Buenos Aires. Ses climats, ses gens et ses rythmes qu'elle a déposé, avec générosité à Perpignan, qui en contre-partie -parfois, il est vrai avec peine- en a fait sa "diva" populaire ultramarine. Elle a mûrit, entre Méditerranée et Canigou, entre Albères et Corbières, mariant ainsi l'Atlantique d'origine à la Mediterranée d'accueil. Un petit bout de femme que Violeta Duarte mais sacrément présente en énergie, en offrande, la générosité spontanée des coeurs purs.

Elle a offert, samedi soir, dans la cour de l'ancen couvent des Minimes, un très beau voyage à un nombreux public, servi par un équipage de trois musiciens en cohérence aussi dévoués qu'inspirés et habiles. Au bout de deux chansons le public était gagné. Des airs, des images, des souvenirs de là-bas qui sont aussi un peu des souvenirs d'ici. Pages d'une histoire d'une "ida y vuelta". Un programme qui a des bases populaires mais guère de clichés, au sens culturel et stigmatisant. Non, si Argentine il y a (elle y est belle et bouleversante avec les mots et les rythmes d'"Agustina y el mar"), ce n'était pas une Argentine pour touristes gloutons de superficiel, de carte postale (la "milonga" n'y est pas sacrifiée sur l'autel d'un exotisme à bon marché, pas de folklore portuaire!). Voleta Duarte -peut-être faudrait-il dire La Duarte- a une dignité bien plus anthropologique, plus ambitieuse  qui exprime (elle le souhaite, le tente et le réussit) la profondeur d'un être (et elle le fait jusqu'à un nid enfoui de larmes), d'un pays, revendiqué dans la beauté de ses métissages, livrant des couleurs d'identité (parfois humiliée) et des mélodies d'universalité (dont les paroles sont plus difficiles à écrire).

Sur scène un être minuscule (comme l'était Piaf, Violeta aussi mériterait ce synonyme de petit oiseau) mais oh! combien mobilisatrice de ses propres forces, quels trésors intérieurs! On l'écoute. Point de plaintives mièvreries, et non plus de frimeuse apparence. Une interprétation à la bonne hauteur des coeurs, sur la juste échelle des sentiments. Elle tisse les fibres de vie, quelquefois avec quelque entrelacs d'humour ou de colère. Violeta Duarte ne fait pas la "star". Elle ne la ramène jamais. Par discrétion et peut-être part timidité. Elle se met rarement en avant de ses musiciens. Elle reste sur la même ligne qu'eux, et pas seulement comme le voudrait quelque règle acoustique. Elle elle est comme Francis Adam, le contrebassiste, Pierre-André de Véra, le guitariste, et François Minicomy, le percussionniste, elle n'est ni plus ni moins qu'instrumentiste de la voix. Sa voix naît, s'envole, touche, pénètre, bouleverse, éblouit...Elle n'agresse jamais, même en glissant des mises au point inter-culturelles (sur l'immigration latine en Espagne, par exemple). Elle chante comme si de rien n'était. Si, bien sûr, il y a le charisme élégant de cette petite dame, fragile mais déterminée,  qui se confie et nous veut du bien.  De l'émotion, de la joie, du bonheur. Le succès de  la chanteuse, longuement applaudie et bissée dans ce concert des Musicales de Perpignan Vème (!) année n'est pas préfabriqué mais construit en direct sur un trio d'accompagnateurs qui sont bien plus que de simples accompagnateurs, et qui savent le montrer dans des échappées solitaires,  sur un répertoire voulu: étendu, par le nombre des titres donnés et, à la fois, diversifié en morceaux de genre relativement courts (pas de balade qui s'étire trop), sur le mouvement général de la soirée, qui progresse en événements et étonnements scéniques.

Des moments précipités et des moments qui lents, des boucles et des traits jetés... et surtout... surtout (le passer sous silence nous vaudrait un envoi sans procès aux gémonies pour cécité volontaire), l'appel à participation à deux magnifiques artistes, Sandra Diaz et Françoise Abenater. Elles ont inscrit dans la trame générale des calligraphies gestuelles et leurs chorégraphies classiques (figures du flamenco) ou contemporaines, créations improvisées ou pantomimes. Comme autant de prolongements, de rebonds, d'éclats. De la grâce, de la sensualité, de l'autorité. Musique, chant et danse. Si l'on peut (et nous ne voudrions  pas être le seul à l'écrire) voir ce spectacle comme un précieux collier de perles offert aux grands privilégiés de cette belle nuit du 18 juillet 2015, les interventions-prestations de Sandra Diaz et Françoise Abenater -aussi stylées qu'éloignées l'une de l'autre- y ont leur joli poids de brillance. De ce type de spectacle, qu'articule le principe trinitaire: trois musiciens, trois artistes, trois arts, danse, musique, chant, on en redemande. Merci Violeta pour cet inoubliable "paseo de l'alma" , et ce si juste balancier entre "el sensual" et "el espiritual".

Ami de Passage.

xxx

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