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Met Barran
2 décembre 2015

L'essayiste Xavier Febrés fait souffler très haut la Tramontane

Vous aimez la...tramontane...un peu....beaucoup...passionnément...pas du tout et vous savez lire un texte écrit en catalan, alors n'hésitez pas procurez-vous "Elogi i refutació d ela tramuntana". Un livre somme, du à l'écrivain essayiste Xavier Febrés, auquel on doit déjà una abondante bibliographie en référence aux Pyrénées à la Méditerranée et à des auteurs comme Josep Pla, Antonio Machado et Aristide Maillol. Outre -ou à cause du vent- cet écrivain transfrontalier et voyageur- à la plume aussi sensible que savante, ne cache pas son adoration pour les terres de l'Ampurdan et du Roussillon, et bien au-delà par-delà monts et océans à la suite ou emporté par son vent inspirateur. Livre précieux fait d'un double capital: populaire et scientifique. Fuit d'expériences de plein air et de bibliothèque. L'auteur n'en est pas à sa premier rendez-vous avec la tramontane. En 1995, il lui éleva déjà une première stèle littéraire, cette fois- ci, très exactement vingt ans après, c'est un monument de plus grande envergure, très nourri, très mûri sur un beau socle de documentation, de l'archéologie à l'astrophysique, de la médecine à l'énergie éolienne, sans négliger les mythologies et sagesses populaires se rapportant dans le commerce avec ce vent. Amoureux de la tramontane et de ses paradoxes, Febrés ne l'est pas peu dans la première des deux parties qui composent son livre. Une partie très subjective, physiologique et intimiste, érotique. A certains moments, on se surprend à lire un épithalame, un magnifique récit de noce avec le vent, à d'autres nous nous découvrons moins analphabètes. Un livre passionnant et très informé à la fois. Dans son écriture comme dans ses effets affectifs, intellectuels, il obéit à la vie séquentielle et intermittente de son héros, ce n'est ici  un héros imaginaire ou de pacotille mais un être bien réel qui vagabonde par ciels et terres, et les palpe un peu, beaucoup, passionnément ou pas du tout. Mobilisant quand il agit corps et coeur, sens et pensées, la géographie physique et la géographie imaginaire, modelant l'une et l'autre. La deuxième partie pourrait laisser croire, du fait du titre général1, à un  développement classique de controverse philosophique: pour ou contre la tramontane. Cette partie, bien plus longue et qui s'arme pour le débat, pour le forum d'histoire -avec dates et faits précis- et de bibliographies en diverses disciplines, (tant météorologiques que linguistiques, psychiatriques ou journalistiques), d'auteurs -autorités connus ou pas, célébrées ou minorées, est un formidable bilan de connaissances relatif à la Tramontane (qui, pour ne pas être inconnue n'en reste pas dans quelques bouffées insaisissable). Bilan de connaissances -utile en des temps où la culture scientifique est rarement sur le podium médiatique- avec une répartition assez équilibrée des contributions des professionnels ou amateurs de Tramontane des deux côtés des Pyrénées. (On le sait depuis longtemps, Xavier Febrés a deux amours: l'Ampurdan et le Roussillon, la Costa Brava et la Côte Vermeille, Figuères et Perpignan). Il est peu de champs négligés par Xavier Febrés qui travaille comme un "naturaliste" à la mode  Zola et pousse sa course-enquête du dieu Éole de la mythologie jusqu' au parc éolien pyrénéen-oriental (dont il est, dit en passant, très admiratif). Il se plaît à confronter les stéréotypes populaires (qui l'agacent parfois un peu) aux données scientifiques auxquelles -ce cartésien du XXI ° siècle- accorde tout son crédit. Si l'auteur incline vers la science (ses mérites, ses avantages et ses chances) il n'en porte pas cependant l'estocade à toute échappée ou persistance de vérité dans nos croyances populaires. La tramontane déracine plus facilement un arbre, ou emporte une toiture qu'elle n'occit, d'un coup de ses gourdins, un bon dicton paysan, de village, de littoral, d'arrière pays.  Dans ce grand livre de 120 pages alternent l'observation et l'analyse, la prose et la poésie, le style lyrique et enjoué, et le style journalistique et didactique. Il décrit, explique, cite et commente et jamais ne tait ses enthousiasmes et ses colères. La tramontane, ça taquine les neurones, ça fouette les sangs, ça souffle dans les bronches des idées toutes faites ainsi que des projets timides ou non aboutis  Si l'on peut y noter l' incontestable sceau du patrimonial avec référence aux papes de l'Ampurdan Dali, Fages de Climent, et Pla - par exemple- il n'est pas fait d'une jalouse cire essentialiste. Shelley ou Goethe, Leopardi hier, García Marquez, de nos jours y ont aussi leur empreinte comme René Char ou Claude Simon. Febrés, voyageur et gourmand, est un attentif comparatiste. De paysages, d'instants, de sensations.... Peut-être, notre auteur chercheur-narrateur mériterait-il le qualificatif de "l'homme aux semelles de vent". Il  connaît tous les coins, recoins et grandes aires du vent. Espaces de liberté comme espaces de drames ou de comédies. Il l'a repéré dans la Bible et l'adore en mille et un lieux, mais surtout à... Quermançó.  Il en connaît toutes les humeurs et senteurs-les hautes comme les basses. Il en connaît les sources et les itinéraires, les langues, les patois, les argots - et les sites (motus! pour les identifier il faut aller au livre!). Des sites-sanctuaires sur lesquels il faut payer d'effort pour lui donner rendez-vous, de jour ou de nuit, quelle que soit la saison et l'y précéder pour s'offrir, alors, totalement à lui. Jusqu'en pays d'Aude, en Provence et au-delà des Alpes. Jusqu'à Minorque et outre-atlantique. Ce livre d'atmosphères -dirait un humoriste- encyclopédique et stylé est habité par beaucoup de monde et de générations et participe autant de la micro que de la macro histoire de la terre, de l'air, du climat. Il a,  pour le lecteur, qui veut en éprouver sur la peau et jusqu'aux os les mystères et les secrets un double mérite: fournir une solide colonne vertébrale diachronique et offrir un ample regard synchronique et ce ne serait pas nous moquer de l'auteur ( qu'il nous comprenne bien!) de donner le titre de "Somme" à cette oeuvre d'esprit de géométrie et de finesse de Xavier Febrés. Il y est question d'architecture, de technologie, de musique, de chansons... De culture des sols et de...land art. On y parle de folie et de sexe... La Tramontane et ses rafales, tourbillons et accalmies... Bien plus qu'un tradition, qu'un monument, voire qu'un cocktail d'influences sur nos vies,  c'est le souffle vital de notre planètes. Un livre, préfacé par J.M. Dacosta et illustré de travaux photographiques du même et publié dans la "Col.lecció Josep Pla" de la "Diputació de Girona". Il aurait pu être dédié à Éole et Gaïa, ce qui en cette période de COP21 n'aurait pas été déplacé. (Espérons une prochaine traduction de ce livre en français).

xxx

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