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Met Barran
17 mai 2019

FOSSA, GALIN, AGUADO

(notes)

 François de Fossa et Dionisio Aguado,  avaient comme points communs la musique, la guitare et le souci de l'enseignement de la musique. D'où l'intérêt pour des Méthodes. L'une d'entre elles semble les avoir réunis. C'est  celle de Pierre Galin( 1786-1821)  auteur de l' "Exposition d'une nouvelle méthode pour l'enseignement de la musique", livre de Galin publié en 1818, à Bordeaux, sa ville natale où il enseignait. Aguado le cite, plusieurs fois dans sa propre Méthode qui paraîtra une dizaine d'années plus tard. De Fossa également dans son "avant propos" et ses notes du "traducteur" mais également dans sa correspondance. Voici un exemple.

 

 Aguado écrit: "Il y aurait un très-grand avantage pour le lecteur à écrire la musique comme le voulait M. Galin. Les deux ou trois divisions principales du temps s'annoncent ainsi clairement à la vue et dans  chacune on apperçoit aussi distinctement les deux ou trois divisions secondaires, s'il en existe."


DE Fossa: " M. Galin écrit les sistèmes (c'est-à-dire, six sons pour un temps) par 3 groupes de deux sons si elles sont des demi-tiers, et par deux groupes de trois triolets si elles sont des tiers de moitié. Il écrit les douzièmes de trois manières: par trois groupes de quatre sons, par quatre groupes de trois sons ou par six groupes de trois sons répartis en trois groupes et trois groupes. La Iere expression vient de la division ternaire et les deux autres de la division binaire. Il n'y a pas de doute que cette écriture est bien plus propre à leur faire appercevoir du premier coup d'oeil la nature de chaque subdivision du temps. .

A l'évidence, ces deux compositeurs, le professionnel et l'amateur connaissent  la méthode de M. Galin. Le madrilène en aurait-t-il pris connaissance par lui-même ou par François de Fossa? Où en a-t-il compris l'importance au début de son séjour à Paris, lui l'exilé de 1823, le résident de l'Hôtel Favart? De Fossa pourrait la connaître depuis l'année même de sa publication, en 1818 à Bordeaux, ville où capitaine d'infanterie de ligne il est en garnison . (Note: Les Annales de la musique de César Gardeton de 1819 disent que  "la Ruche d'Aquitaine", Journal de littérature et de Sciences, de Bordeaux, publia dans son cahier du 15 octobre 1817 un long article sur la méthode d'enseignement de M. Galin : “De la méthode de M. Galin, professeur à l'Institut des sourds-muets de Bordeaux. Plus tard, Galin migra à Paris où il ouvrit une école de musique, rue Louis-Le-Grand, n°3.    

Galin est un auteur que de Fossa apprécie et cite. Bien avant sa rencontre parisienne avec Aguado. Par au moins trois, il l'évoque dans des lettres à sa famille perpignanaise: lettre à sa soeur Thérèse, lettre à son filleul François (qu'il  appelle une fois "mon cher Francisque"), lettre à sa nièce Théresette. Une correspondance où l'on lit par exemple qu'il a le projet de composer une méthode.  Il signale à sa soeur, à l'intention de Théresette, qui est en train d'apprendre la guitare:


    "Je ne connais point de méthode que je voulusse conseiller à personne. J'ai l'intention d'en composer une cet hyver. Après l'inspection je t'enverrai dans chacune de mes lettres quelques préceptes étayés d'exemples qui en apprendront davantage que toutes ces mauvaises méthodes.  Il faut surtout pour la musique vocale, beaucoup d'accords, beaucoup d'arpèges, beaucoup de gammes dans tous les tons, et démancher dès le premier jour" (Lyon, 16 sept 1819). Il répète  dans ce même courrier lyonnais
  "Je me propose toujours de faire, dans mes moments perdus, une méthode de guitare.”  et confie “Je vois très peu de société à Lyon; point du tout de la haute parce qu'elle m'ennuie et qu'on n'y fait que jouer. Trois, ou quatre familles honnêtes forment le cercle étroit où je passe mes moments de loisir. Si ce projet reçoit son exécution pendant mon séjour dans cette ville à coup sûr tu le recevras franc de port."

A-t-il pu mener à bien ce projet lyonnais? Existe-t-il  dans sa correspondance "quelques préceptes étayés d'exemples"? Il n'en serait rien. Dans l'inventaire de sa bibliothèque après le décès de Fossa (le 3 juin 1849): "Environ trois cents cinquante volumes reliés et brochés" [...] et autres ouvrages ne méritant description [...], on n'en trouve ni titre ni trace. 

De Fossa est constant dans son attention à la famille. En Espagne comme au Mexique, et en France. A ce moment le préoccupe l'éducation et la progression des études sa nièce qui apprend la musique vocale et la guitare. Il s'étonne: "Pourquoi M. Coste n'a-t-il pas adapté la méthode de M. Galin? C'est la seule qui puisse rendre excellent musicien en très peu de tems ; on a reconnu son mérite à Paris, au point de l'enseigner exclusivement à toute autre" (Lyon, 19 janvier 1820).

Comme la correspondance est unilatérale nous n'avons pas d'éléments de réponse.

 
     Un an et demi plus tard répondant à sa nièce, il lui dit:


  "Je suis enchanté, mon aimable Théresette, que la guitare que je t'ai envoyée soit à ton goût, mais vraiment cela ne vaut pas tous les remerciements que tu m'en fais. Tu ne me dis pas ce que tu sais faire sur cet instrument. Ton maître te familiarise-t-il avec le grand et petit barré? 1 Cela fait un peu mal aux doigts dans le commencement, mais c'est indispensable pour devenir d'une certaine force, et dès qu'on fait tout que de jouer d'un instrument, il faut avoir l'amour propre de vouloir s'élever au-dessus de la médiocrité. Il faut surtout te bien attacher à tirer une bonne qualité de son. La musique est faite pour plaire plutôt que pour étonner"( Ier juillet 1821).


Cette question du "petit barré" est évoqué par De Fossa dans un "note du traducteur" à la Méthode d'Aguado.

"M. Aguado n'admet point ce qu'on appelle en France petit barré ° (lorsque l'index ne prend que deux ou trois cordes) qu'il regarde à non droit comme inutile: car on serait toujours forcé d'en venir au grand barré, sans lequel la musique de SOR est inexécutable, tandis qu'avec celui-ci on peut fort bien se passer de celui-là; or pourquoi deux manières, pourquoi deux méthodes lorsque une seule suffit".

Cette note, entre autres, montre que de Fossa était sensible à marquer les différences d'exécution, traditions et innovations. 

Une autre référence épistolaire à Galin se trouve dans un conseil qu'il donne à son filleul s'initiant, semble-t-il, lui-aussi à la musique.


     "Ta soeur a déjà quelques notions de musique et de guitare. Je ne crois pas que tu t'en sois encore occupé, et je te conseille de m'atendre. Tu n'auras reculé que pour mieux sauter. Je ne prévois pas d'inconvénient pour mon semestre prochain; et pourvu que tu puisses disposer d'une heure ou deux par jour pendant mon séjour à Perpignan, je crois pourvoir te répondre que, graces à la méthode de M. Galin, je te rendrai musicien dans cet intervalle au moins assez pour que tu puises te pousser toi-même sans le secours d'aucun maître." (Strasbourg 15 février 1822).
        
      L'oncle eut-il l'occasion d'introduire Galin dans les étages de la maison familiale de Perpignan, maison en visis à vis à la fontaine Na Pincarda? S'il y est bien venu de Strasbourg en semestre. L'esprit, hélas!, n'était sans doute pas à la pédagogie musicale. La raison en étant le cancer dont souffrait Thérèse Campagne, maladie qui l'affaiblissait depuis bien des années déjà et devait l'envoyer ad patres  le 16 janvier 1823 -à 11 h du matin. Cette disparition va mettre un terme à l'abondante correspondance (unilatérale), et tout autant abondante source d'informations.

xxx

"En Musique, en Guitare, comme en toutes choses, il existe des préjugés, de vieilles routines, et il n'est pas possible que ce soit autrement: car il est très peu de personnes qui aient la sagacité de reconnaître le vice de ce qu'elles ont appris, la bonne foi de l'avouer et le courage de le désapprendre." (In Avant-propos à la Méthode Complète pour la Guitare de Dionisio Aguado). Ces quelques lignes montrent que dans la théorie comme dans la pratique de son art, De Fossa ne pouvait être un conservateur. Comme son admiration de Galin ("l'immortel Galin", écrit-il) et son amitié avec Aguado le placent du côté des modernes, des innovateurs.  S'il n'avait eu curiosité, qualité et compétence, Aguado aurait-il souligné avec respect dans sa "préface" à sa Méthode: "M. de Fossa, mon ami, à qui la guitare est familière, a bien voulu coopérer à cette partie de mon travail en rectifiant quelques théories et en me fournissant, pour le compléter, un abrégé des règles de l'art de moduler appliqué à cet instrument".

xxx


    ° L'ouvrage de M. Galin qui, dit-on, n'échappa pas à la contestation, connut cependant un beau succès. Après sa mort (1821), il sera complété par son disciple et biographe Aimé Paris, avec l'aide de sa soeur Nanine Paris et Emile Chevé, son beau-frère..Il sera réédité une troisième fois à Lyon en 1835.

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