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Met Barran
25 mars 2014

Molins de Rey: Lettre de François de Fossa à son filleul

Dans la correspondance de François de Fossa (1775-1849) que possède les archives départementales des Pyrénées-Orientales si l'essentiel des lettres est adressé à sa soeur Thérèse, d'abord Fossa, puis, après son mariage, Campagne, rue Na Pincarda a Perpignan, il existe cependant un certain nombre de lettres, surtout après la mort de sa soeur, au début de l'année 1823, à son beau-frère, à son neveu et Filleul, François, et à sa nièce Théresette. Voici un exemple de ces lettres. Elle est adressée de Molins de Rey, près de Tarragone en Catalogne à son neveu, étudiant en droit à Toulouse. Entré en Espagne avec les Cent Mille Fils de Saint-Louis (1823-1824), Fossa s'est vu confier le commandement de la place de Molins de Rey.

Molins de Rey le Ier 7 bre.1823

   Voilà bientôt, mon cher filleul, le tems de ton départ pour Toulouse. Je me flattais il y a quelques mois que nous pourrions y être ensemble. Vain espoir! Rien e tourne au gré de mes désirs. Dieu sait pour combien de tems nous sommes encore dans ce pays, et il n'est pas un seul de nous à qui il ne tarde d'en sortir. Il n'existe plus de corps d'armée que celui de Milans, et c'est justement dans le recoin où nous nous trouvons. Il a répondu dernièrement à une nouvelle sommation du Maréchal que tant qu'il commanderait à un seul homme il ne se rendrait pas, qu'au surplus il n'était pas le maître suprême, qu'il obéissait à un chef et qu'on pouvait s'adresser à lui. Cette réponse a indisposé le Maréchal qui est décidé à le poursuivre à outrance si le Prince, dont on a demandé les ordres, veut bien y consentir. En attendant ce coquin nous tua du monde tous les jours. Le 27 il fit une sortie de Tarragone avec beaucoup de troupes et s'empara de toutes les hauteurs qui dominent notre position; le 28 il fut attaqué à son tour, débusqué de toutes ses positions et rejetté sur Tarragone. L'affaire dura depuis 10 heures du matin jusqu'à 5 1/2 du soir et fut assez meurtrière. On dit que nous avons 300 hommes hors de combat. C'est ainsi que me l'écrit un off.er du Régt. dont les deux derniers bataillons sont avec le Maréchal, mais n'ont donné dans aucune des deux affaires. Il est assez singulier que pendant qu'on traite à Cadix, et que peut-être on est déjà d'accord, ici la guerre prenne un caractère d'activité qu'elle n'a pas encore eu. Je ne regarde pas comme impossible que nous nous battions en catalogne longtems après que le Roi Ferdinand sera à Madrid, ni même que nous ayons pour ennemis avant de rentrer en France ceux qui maintenant combattent dans nos rangs.Tu te souviendras quelque jour de cette expression qui te paraitra maintenant hazardée.

   Le Ier Baton. de mon Régt. est ici, excepté quelques comp.ies. détachées; la mienne est du nombre, il y a plus d'un mois que je ne l'ai vue, car on me laisse toujours commdt. de la place. Je me suis ap^perçu que bon nombre de mes frères d'armes ne voient pas sans jalousie, même sans dépit, la considération dont je jouis dans le pays. Si cela les ennuye, j'en suis fort faché, mais je suis aussi ennuyé de mon côté de faire un métier qui ne me conduit à aucun avantage et le jour où je les quitterai ne sera pas un des plus mauvais de ma vie. Pour le moment mon poste ne me procure d'autre avantage que le plaisir bien réel de faire quelque bien aux habitants du pays, de leur éviter des vexations non sans murmure de ceux qui voudraient tout tuer, et celui d'être constamment occupé à un travail qui me plait beaucoup plus que le triste métier de monter des gardes ou de passer des inspections.

   Je te prie de faire de ma part une visite aux Dames Chambon pour les complimenter sur l'heureux mariage de Mlle Grace. Tu sais qu'on embrasse toujours en pareille circonstance, ces Dames me permettront de le faire par procureur en attendant que je puisse le faire moi-même, car les embrassades ne prescrivent jamais. (Le coeur ne te battait-il pas un peu lorsque tu écrivais ce paragraphe de ta lettre du 11 août?)

   Adieu, mon cher filleul, porte toi-bien, embrasse de ma part ton papa & ta soeur qui me semble un peu paresseuse à m'écrire et aime moi toujours. (signé) F. de Fossa

   Je recommande toujours bien mon procès. Je compte sur cela pour quitter le service de suite après la campagne, car mes épaulettes commencent à me peser furieusement sur les épaules.

xxx

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