Disparition de Vicent Madremany, l'art en deuil à Perpignan

Il s'était donné un Centre d'Art Contemporain à la force de son travail. Il l'avait conçu aux dimensions de son ambition: celle de porter, à Perpignan, dans le Sud de la France, haut les couleurs de certains courants de la peinture vivante au début de ce XXI° siècle. De Saint-Charles à l'avenue Grande-Bretagne, c'est ça àcentmètresducentredumonde, l'invention d'une utopie signée Vicent Madremany qui vient brutalement de nous quitter. Un Valencien, multilingue, entrepreneur, féru de littérature, musique et d'art pictural. En réaménageant un vieux hangar du temps où Perpignan avait son mot à dire dans le négoce du vin, en un lieu de présentation d'expositions qui a donné, devenant sa passion exclusive, un sacré coup de fouet au monde artistique ronronnant autour de son Castillet, en y montrant des maîtres européens d'aujourd'hui (espagnols, français, hollandais...) et haussant le crédit de la ville en tant que destination artistique. Certains à ses débuts l'ont boudé: étrange étrangeté du nouveau! D'autres y perçurent comme la possibilité d'une miniature de Beaubourg en province. Il y eut celles et ceux enfin qui se rallièrent au- fur- et- à- mesure de la mise en lumière de ce  lieu comme... incontournable. A travers sa "politique" d'artistes. Sa particularité de dépôt de coopérative de collectionneurs. Ses relations avec les autorités municipales, départementales ou régionales. Son ouverture aux publics et aux initiatives associatives littéraires, musicales, théâtrales, débats, projections.  Le "home Madramany", sacré maison de tous, apprécié de la presse et pas seulement pour ses vernissages gourmands.  Initiateur- bâtisseur, cheville -ouvrière, manager et esprit critique, hospitalier, audacieux et participatif. Boussole sensible et indispensable pour avancer sur notre océan d'actualités remuantes, Vicent Madremany n'est plus. Une figure d'importance a tiré sa révérence mais laissant une forte empreinte. Sa frêle silhouette qui, déterminée, venait à vous, son sourire qui donnait sa clef d'amitié à tout échange (même sur des questions de langue ou de politique où une convergence finale était plus qu'improbable), ses enthousiasmes dans le rappel des essentiels (la peinture italienne et hollandaise), ses foudres contre un certain contemporain de la posture, sa défense d'une peinture de conscience et d'objectif humanistes, sa fidélité à des gens et des valeurs qu'il aimait à rappeler vont manquer.  Il n'y avait pas une rencontre, un dialogue avec Vicent Madremany qu'il ne colorât de quelques nuances de provocation et d'humour. Mais ce qui faisait la belle réputation de Vicent Madremany auprès des artistes c'était l'attention et respect qu'il portait à leur travail et les connaissances qu'il avait de l'histoire de l'art. Et ce que notre société lui doit c'est d'avoir été par ses curiosités, ses intuitions, ses paris et ses partages un facteur audacieux, constant, et efficace d'une démocratistaion de l'offre pictuale à Perpignan.

Que la famille et les proches de notre "amic Vicent" trouvent ici l'expression de nos plus sincères co condoléances.

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