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Met Barran
31 janvier 2014

Cavanna is dead

Nous venons de lire sur un blog, dit l'archipelcontrattaque, un entretien avec le chanteur Pere Figueres à l'occasion de la sortie de son dernier opus "Ocells" (à savoir oiseaux). C'est gentil, c'est sympa et c'est utile. Mais pourquoi l'animateur de ce bloc s'est-il cru obligé de le rubriquer dans une catégorie nommée "Catalanité". A-t-on vu, ici ou ailleurs, rubriquer le dernier opus d'un Higelin ou d'un Lavilliers dans une rubrique qui serait affirmée "Francité" (ou "Gallicité")? N'aurait-il pas été plus facile et compréhensible de rubriquer "Poésie" ou "Chanson"? Ou mieux de titrer: "Chef-d'oeuvre".

Une petite lucarne préposée aux bruits du monde nous fait part d'un petit Poucet qui envoie des cartes postales et sème des petits cailloux dans l'intention, distillent nos médias généralement bien informés (sic!), de revenir. Il en rêve, comme rêvait de revenir à Paris le déporté de l'île d'Elbe, un certain Napoléon. Ce dernier revint et le lendemain de son rêve ne dura que "Cent Jours", ensuite ce fut la catastrophe de Waterloo, suivi du naufrage de Sainte-Hélène (note: volontairement nous n'utilisons pas ici un langage sportif!). Alors, notre petit Poucet, ses cartes postales et ses petits cailloux quand est-ce qu'il sortira des bois, où une fois déjà il a été perdu, où il a été abandonné par une partie de sa famille.

Question lancinante et tout autant inquiétante: Quand alzheimer est là, la nuit est-elle allégée de nos rêves?

xxx

Cavanna. François Cavanna (1923-2014). Encore un François. Mais lui il était pape et président du verbe offensif et anti-autoritaire, sans marges ni ratures, sans calculs ni mensonges. Un visage qui écoutait, tendu et prompt à la réplique. Une voix braise de sarments. Une plume rageuse, éclairante et bienfaisante. Contres les Césars de la planète et du quartier le plus proche. D'hier et d'aujourd'hui. L'humour en guise de kalachnikov. Le coeur gros comme ça, avec des accents à la Margot. Celle de G. Brassens dégrafant son corsage...pour donner la goutte à son chat, et toutes autres Margot, héroïnes des fumetti et de mélodrames. Une emphase bien ajustée, au service des braquage des banques de conneries, de saloperies, de discriminations et d'exclusions. Une parole haute et claire, anti-icônes, anti-sanctuaires et anti-catéchismes de chastetés à tous les étages de l'individu. Il y avait, dans son portrait de pied en cap, un Christ version Vercingétorix. A la fois guerrier et prophète. Avec, au poignet, le flambeau d'une liberté d'expression qui ne se laissait pas marcher sur les pieds aux ongles incisifs. Pas question de mégoter, ou de faire le beau pour une galerie galerie. Un esprit, un langage, un cachet...Il ne fut jamais quelque paillasse utile, ou un chroniqueur pour rien. La liberté est un combat. De penser, d'écrire, d'agir. Qui ne laisse guère de repos, il faut la décrotter de sa somnolence dans "juré, craché, c'est pour la vie", la protéger contre toute velléité de la mettre en geôle ou de l'amputer, aujourd'hui je t'arrache ceci, et demain... Ecrire, penser avec courage et lucidité, loin des buissons de préjugés, sans langues de bois. Il le montra avec son vocabulaire coloré, trousseur d'usages et conventions, son style musclé  et cinglant dans Hara Kiri et Charlie Hebdo. Dans la joie et la fête, le débridé non-conformiste. Il appartint ou plus exactement co-fonda la génération que l'on n'a pas encore osé appeler les "satyrikmen". Provocateur, peut-être, sans doute et...bien heureusement. Des enthousiasmes et des colères. Jamais tordues, jamais sous cape. Poitrail ouvert, l'émotion jamais mauvaise compagne de la raison. Le brillant journaliste se fit alerte et profond écrivain (les Ritals, les Ruskoffs, etc...), égotique même. Il balaya de sa lucidité Paris et l'hexagone. Ainsi, gambergea-t-il, plus libre encore, plus franc, plus loyal, prospectant son imaginaire et ses histoires. Il parvint à s'arracher à l'humus du quotidien et à tracer son étoile très au-dessus de l'écume de l'actualité. Humaniste suprêmement libertaire, hostile à toute mise à mort. Un compagnon de qui on n'a jamais serré la main, avec lequel on n'a même pas échangé un courrier, et pourant si nécessaire, si complémentaire. Longtemps, ses coups de gueule et ses lutineries anthropologiques furent nos bulletins de santé mentale. François Cavanna is dead.

J.Q.

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